Mozilla lance une pétition contre le projet de loi français de filtrage au niveau du navigateur

1140

La fondation Mozilla alerte l’opinion au sujet d’un article du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (SREN) qui « créerait un dangereux précédent et servirait de modèle à d’autres gouvernements pour à leur tour transformer les navigateurs en outils de censure gouvernementale. »

La Fondation Mozilla vient de lancer une pétition « pour empêcher la France d’obliger les navigateurs tels que Firefox de Mozilla à censurer des sites web directement au niveau du navigateur » :

«  Cette mesure créerait un dangereux précédent et servirait de modèle à d’autres gouvernements pour à leur tour transformer les navigateurs en outils de censure gouvernementale. »

Mozilla souligne cela dit que « le temps presse », à mesure que le gouvernement a déposé au Parlement son projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (SREN) « peu avant les vacances d’été et espère l’adopter aussi rapidement et discrètement que possible ; le gouvernement a même engagé la procédure accélérée, le vote devant avoir lieu à l’automne ».

Le projet de loi amendé et adopté, en première lecture, au Sénat, a été transmis début juillet à l’Assemblée.

Un précédent mondial qui nuira gravement à l’internet ouvert

Dans un billet de blog publié en juin intitulé « La proposition française de bloquer les sites web via le navigateur nuira gravement à l’internet ouvert mondial », Mozilla qualifiait ce projet de « tentative louable, mais périlleuse de lutter contre la fraude en ligne », obligeant les créateurs de navigateurs « à mettre en oeuvre une fonctionnalité technique relevant de la dystopie » :

« L’article 6 du projet de loi SREN obligerait les développeurs de navigateur à créer les moyens de bloquer obligatoirement les sites web figurant sur une liste fournie par le gouvernement et intégrée directement dans le navigateur. Une telle mesure renverserait des décennies de normes établies en matière de modération des contenus. »

Mozilla avançait que « pour atteindre les objectifs de cette législation, il serait plus judicieux de tirer parti des outils de protection existants contre les logiciels malveillants et l‘hameçonnage (phishing) plutôt que de les remplacer par des listes de blocage de sites web imposées par le gouvernement » :

« Plutôt que d’imposer un blocage basé sur le navigateur, nous pensons que la législation devrait se concentrer sur l’amélioration des mécanismes existants déjà utilisés par les navigateurs – des services tels que Safe Browsing et Smart Screen. La loi devrait plutôt se concentrer sur l’établissement de délais clairs et raisonnables dans lesquels les principaux systèmes de protection contre l’hameçonnage devraient traiter les demandes légitimes d’inclusion de sites web émanant d’agences gouvernementales autorisées. »

Mozilla déplorait en outre l’absence de référence à des implémentations préservant la vie privée ou à des mécanismes empêchant l’utilisation de cette fonction à d’autres fins :

« En fait, la possibilité pour un gouvernement d’exiger qu’un certain site web ne s’ouvre pas du tout sur un navigateur/système est un terrain inconnu et même les régimes les plus répressifs dans le monde préfèrent jusqu’à présent bloquer les sites web en amont du réseau (fournisseurs d’accès à Internet, etc.). »

À l’en croire, il s’agirait d’ « un précédent mondial » qui, bien que cantonnée à ce jour aux seuls logiciels malveillants et à l’hameçonnage, « créera un précédent et donnera aux navigateurs la capacité technique de réaliser tout ce qu’un gouvernement pourrait vouloir restreindre ou criminaliser dans une juridiction donnée, et ce, pour toujours » :

« Un monde dans lequel les navigateurs peuvent être forcés d’incorporer une liste de sites web interdits au niveau logiciel qui ne s’ouvrent tout simplement pas, que ce soit dans une région ou dans le monde entier, est une perspective inquiétante qui soulève de sérieuses préoccupations en matière de liberté d’expression. Si cette loi est adoptée, le précédent qu’elle créerait rendrait beaucoup plus difficile pour les navigateurs de rejeter les demandes de ce type émanant d’autres gouvernements. »

Source nextinpact.com